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La curation en long, en large et (souvent) en travers

Ça fait un petit moment que je lis des articles sur la « curation » (issue du mot anglais et non du sens français comme le faisait remarquer Titiou Lecoq dans son billet).
Le sujet déchaîne les passions numériques. On se demande si le curator est un veilleur, si c’est un « bullsh** marketing » ou si le curator va  résoudre les problèmes d’infobésité. Le mot agace et les débats autour de cette fonction ressemblent souvent à de longues logorrhées ou à des panégyriques
 sans vraiment s’intéresser aux outils. Prenons donc de la distance et de la hauteur pour parler de ces petites inventions bien pratiques qui, faute de changer la face du web, rendent service à des utilisateurs avertis.
 

Pour ceux qui auraient la fainéantise de cliquer sur le premier lien (ci-dessus), sachez qu’on parle de curator pour désigner une personne qui sélectionne et compile des contenus pour, en général, les rassembler en un seul et même endroit. Les plateformes de curation les plus connues sont Storify,  Curated.by,  Keepstream,  Research.ly ou encore Scoop.it. J’en ai testé quelques-unes  mais puisqu’on ne peut parler de curator sans râler, je vais râler aussi (mais différemment).

Tout d’abord, si certains attaquent le fait de donner un nom barbare à un acte qui « serait vieux de plusieurs années », je précise que la curation n’est pas censée être aussi large qu’une sélection de liens que l’on ferait dans un blog, à moins que cette sélection soit restreinte à une seule thématique. Certains, comme Eric Scherer ou Alex Gamela, le font très bien en ce qui concerne le métier de journaliste par exemple.

Le véritable intérêt de la curation réside justement dans sa capacité à concentrer en un seul endroit toutes l’actualité d’une thématique précise, comme la 4Gles pirates ou la société collaborative… Rares sont les blogueurs suffisamment obsessionnels pour tenir une ligne éditoriale aussi restreinte sans jamais dévier.

Tumblr et Pearltrees des outils de curation avant l’heure

Tumblr c’est une plateforme de micro-blogging, souvent associé aux teenagers, à la génération skins, mais l’un des exercices de prédilection de ses utilisateurs, c’est bel et bien de créer des espaces web monomaniaques. Tapez Fuck Yeah + le nom de votre artiste préféré, pour un peu qu’il soit mainstream, sachez qu’une page lui est déjà dédiée, Lady GagaJustin Bieber, il y a même un site pour savoir si un FuckYeah de votre star existe. Je parlais de monomanie, si vous avez du temps à perdre et un besoin de Lol à combler, il y a les monomanies créatives comme SelleckWaterfallSandwich ou encore DianaRainbowCheese, mais là je digresse 😉


Sans tirer de grandes conclusions, je dirais que ces nombreux exemples d’utilisation naturelle de l’outil Tumblr pour sélectionner un seul type de contenus montrent bien que l’acte de curation est un acte qui s’est imposé comme un usage naturel du web, puisque le problème du web c’est son immensité.
L’activité de collectionneur aurait donc survécu à la dématérialisation, se transformant peu à peu en collectionneur multimédia en ligne.

Quant à Pearltrees, on a longtemps comparé cet outil à l’avenir du bookmarking sans jamais vraiment comprendre comment l’utiliser. Sur Pearltrees, chaque bookmark, chaque lien est visualisé sous forme de perle, vous pouvez alors créer des « perles racines » (comme on créerait un dossier pour ranger plusieurs documents sur son bureau) dans lesquelles vous allez ainsi organiser vos favoris en un seul lieu thématique.
La force de ce site c’est de permettre de lier des favoris entre eux, de leur donner une arborescence. Si, par exemple, des faits d’actualité découlent les uns des autres, alors plutôt que de mettre ces liens au même niveau (sous un même mot-clé), vous allez pouvoir créer une branche de liens découlant visuellement les uns des autres. 

Pearltrees a bel et bien de l’avance sur tout le monde, et sûrement trop pour être adopté facilement, cela dit je prends le parie que les tablettes tactiles devraient permettre à ce site de prendre de l’ampleur tant l’interface web a été pensée (où pas) pour toucher, manipuler ces perles. Cette architecture de branches n’existe sur aucun des sites officiellement dits « de curating » et c’est là souvent leur faiblesse. Keepstream n’est pas très sexy, Storify a lui fait ses preuves pour être embeddé dans un article, mais celui qui me parait le plus intéressant puisqu’il permet de créer une page très lisible, c’est Scoop.it.

Mon expérience de Scoop.it

Je le redis, si une chose est bien claire dès le début sur Scoop.it, c’est que le site vous incite clairement à vous spécialiser sur une thématique, quitte à créer d’autres pages sur chacune des thématiques sur lesquelles vous faites de la veille. 


Moi-même en m’inscrivant, je n’avais pas anticipé ce qu’un outil de curation pouvait impliquer. Alors que les autres sites récupèrent vos favoris ou vous proposent de rechercher des éléments pour étoffer votre article, Scoop.it met à disposition une page par thème en vous proposant une interface de veille…Vous pouvez agréger vos sources d’informations par le biais de recherche de mots-clés, de compte ou de liste Twitter et de flux RSS. Si je compare avec mon agrégateur de flux, j’ai ici une information bien plus ciblée et bien plus large (grâce au fait de mélanger RSS et twitter) que dans mon Google Reader qui est pourtant bien rangé. Ce dispositif donne donc un outil de veille plutôt pratique tout en permettant de rajouter des articles hors de cette veille (Via un bookmarklet).
Rajoutez à cela la possibilité donnée à n’importe qui de vous proposer un article en rapport avec votre thématique et vous avez un outil collaboratif, relié aux réseaux sociaux (Facebook et Twitter) et plutôt efficace (quoi qu’à perfectionner).
La petite surprise est venue après m’être abonné à certaines thématiques « curatées » par d’autres. On reçoit chaque jour un récapitulatif des mises à jour thème par thème et c’est là tout l’enjeu de la curation: avoir des infos très ciblées sans même les chercher.

Tout le monde s’accorde sur le caractère chronophage de la veille mais, désormais, certains sites permettent de faire le tri dans nos flux et d’identifier plus rapidement les contenus qui commencent à faire du bruit. C’est le cas de Summify ou Cascaad. La curation s’inscrit également dans cette démarche (gagner du temps) mais elle ne repose pas sur un algorithme.  Ce qui fait la curation c’est l’humain (comme l’a intelligemment anticipé Aaaliens) et aussi la spécialité (ce que les services basés sur des algorithmes ne proposent pas encore).

Et si la « curation » permettait, à l’avenir, à tous veilleurs d’avoir plus de temps pour produire des articles? Le mot n’est pas très beau, j’en conviens, c’est peut-être un mal pour un bien…

BONUS : De la curation sur… la curation 😉

Content : An illustrated history par Philip Shelldrake
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Auteur·e

cuisineanxious

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